Dans le cadre du festival « En mai, danse comme il te plaît« , le ballet Julien Lestel présentera Rodin le 26 mai, à 21h, à La Croisée des Arts. Entretien.
Pourquoi avoir fait le choix de Rodin ?
« Chez Rodin, il existe un rapport au corps qui m’intéresse particulièrement. J’avais vraiment envie de mettre en mouvement tout ce que ses sculptures expriment et révèlent.«
Quelle est votre technique pour transmettre des émotions ?
« Quand on voit une sculpture, on se projette, on fait marcher son imaginaire et en tant que chorégraphe, j’ai essayé de retranscrire toutes les émotions qu’on pouvait ressentir en regardant une sculpture. Je me suis aussi beaucoup documenté sur Rodin, sur les raisons qui l’ont poussé à sculpter tel ou tel personnage, de cette manière-là, et j’en ai fait une chorégraphie.«
Quels sont les retours du public ? Nous ne sommes pas tous sensibles aux mêmes choses, il est difficile d’arriver à toucher une salle entière…
« Ce n’est pas trop narratif. Je pense par exemple à la statue du baiser, un couple en marbre enlacé. Au final, cela reste un pacte d’amour et le public est en cela touché.«
La danse a certes un vrai public mais nous ne sommes pas au stade de la démocratisation même si du chemin a été parcouru….
« J’essaye de faire une danse accessible. Je pense déjà que toute personne qui va voir un spectacle est capable de ressentir des émotions, il n’est pas forcé d’avoir les codes de la danse. Je tente de proposer une chorégraphie qui parle un peu à tout le monde, par le biais de gestes subtils, délicats, ou alors via des rythmes vraiment soutenus où l’on voit le danseur un peu à la façon d’un athlète. J’aime le travail sur le corps.
Julien Lestel : « Une pièce très épurée avec de très belles lumières qui sculptent l’espace »
Ce spectacle marche bien, les gens sont embarqués car il y a beaucoup de poésie, il s’agit d’une pièce très épurée avec de très belles lumières qui sculptent l’espace. On a créé une ambiance et le spectateur se laisse mener tout au long des scènes qu’il connaisse ou pas les sculptures, il y a plein de nuances à découvrir, des scènes de groupes, des duos… Si le spectateur connaît Rodin il va apprécier différemment les choses, je pense notamment à une statue qui s’appelle l’âge d’Airain, un jeune soldat qui fait un solo. Quand on ne connaît pas, on voit un danseur qui fait un beau solo. On n’a pas besoin de connaître les œuvres de Rodin pour apprécier le ballet.«
Vous pensez qu’il manque quoi pour que M. et Mme Tout le monde franchissent ce cap et aillent assister à un spectacle de danse comme ils iraient voir une pièce de théâtre ?
« On essaye de faire ce que l’on peut pour sensibiliser les gens. A chacun ensuite de faire preuve de curiosité. J’essaye de faire des choses de qualité, je ne vais pas vers la facilité et ne verse pas dans le conceptuel où il faut se tordre le cerveau pour essayer de comprendre.«
Quels sont les autres artistes qui vous inspirent et suscitent en vous des émotions ?
« Il existe des listes entières d’écrivains, de musiciens, sculpteurs, peintres. J’ai des goûts très éclectiques j’aime autant Chopin qu’une musique d’aujourd’hui rythmée comme le hip-hop, je suis sensible à différentes formes artistiques ; même dans la peinture, je vais adorer un Kandinsky et en même temps aussi avoir beaucoup d’émotion pour un Renoir, pareil pour la littérature. Je me nourris de choses très différentes.«